Nous clôturons notre séjour au Cambodge par un court passage dans sa capitale, Phnom Penh. Le temps d'une après-midi, nous nous plongeons dans la tristement célèbre prison S-21. Récent témoin de l'intemporelle et ambitieuse folie humaine, cet ancien lycée avait été reconverti en centre de détention et d'interrogatoire sous le régime de Pol Pot. Étrange et froide impressions dans ce lieu encore fortement marqué par les horreurs qui s'y sont déroulées. Laissé quasiment tel quel, à peine réaménagé et accompagné d'explications (très) succintes, il laisse au visiteur la liberté de ressentir de lui-même le malaise et la rage que suscite le témoignage de cette sombre partie de l'histoire cambodgienne.
Les lits de torture, surplombés d'imposantes photos des corps trouvés à l'arrivée des libérateurs font froids dans le dos... Assez glauque. Un tel processus d'extermination et ce à la fin des années 70 ! On ne parle pas du moyen-âge ou des camps nazis... Non, on parle d'un pays du Sud-Est asiatique à la fin des années 70 !!!
Dans ce Cambodge donc, au terme d'une guerre civile, les vainqueurs Khmers Rouges prennent le pouvoir en avril 1975. Ils s'empressent de vider les villes et de déplacer les populations dans les campagnes afin de les contraindre à devenir paysannes. Ils lancent dans le même temps une épuration des intellectuels, artistes, professeurs, médecins, vietnamiens, de ceux qui portent des lunettes, de ceux qui aiment chanter, etc... Bref, tous ceux qui ne font pas partie de la classe paysanne sont susceptibles d'être assassinés, torturés ou affamés. Entre 75 et 79, un quart de la population du pays fut décimée. Les massacres furent finalement stoppés par la "libération" du pays par l'armée vietnamienne... Notons qu'à ce jour, très peu de responsables ont été condamnés et qu'un procès est en cours... Ajoutons également que Pol Pot et sa clique ont longtemps été protégés dans leur fuite par la Chine et les États-Unis, en toute connaissance de cause...
Après cette joyeuse étape, c'est Saigon, la capitale économique du Vietnam (renommée depuis la réunification du pays en 1975, Ho Chi Minh Ville) que nous rejoignons, en bus pour changer ;-).
Quatorze ans après l'avoir quittée, Jérémie retrouve la ville de son adolescence... Elle a énormément changé mais malgré le bruit et l'encombrement, on y retrouve de bons souvenirs. La tâche n'est pourtant pas facile, tant les rues se sont transformées, il n'y a quasiment plus de cyclo-pousse ni de vélo mais des milliers de motos et de nombreuses voitures qui s'arrêtent maintenant aux feux rouges !!! Cela reste cependant un véritable challenge que de traverser une rue...
Les façades des immeubles sont illuminées, des boutiques ont ouvert partout, la société de consommation est en marche. Saigon est devenue une grande agglomération du Sud-Est asiatique, à mi-chemin entre Bangkok et Phnom Penh... La nuit ça clignotte de partout, le jour c'est le klaxon qui est roi !
Certes, il reste toujours ces gigantesques panneaux de propagande communiste, ces drapeaux rouges frappés de l'étoile jaune ou d'une faucille et d'un marteau. L'oncle Ho (Ho Chi Minh) est toujours à la mode sur les murs mais la jeune génération semble très peu concernée par le socialisme, occupée qu'elle est a découvrir les joies de la consommation exacerbée.
Nous arpentons donc ce joyeux bazar, retrouvant avec plaisir l'École Francaise Colette (une pensée pour les anciens élèves qui lisent ce blog), l'ancienne maison Godon, puis les classiques palais de l'indépendance, Poste, Cathédrale, marchés couverts, etc...
Même si les maisons tubes (ou tranches de pain de mie, au choix) ont poussé comme des champignons, que les rues sont devenues des avenues et les revêtements bétonnés ont remplacé les chemins de terre, il y a une chose qui n'a pas bougé ici, pour notre plus grand plaisir, c'est la diversité et finesse des plats vietnamiens. Cela faisait un bail qu'on n'avait pas parlé de bouffe sur ce blog hein ? ;-) Bref, la nourriture de rue reste délicieuse malgré l'inconfort des installations. Les petites chaises et tables en plastique sont toujours là ! Et c'est au ras du sol que nous nous régalons de pho, banh beo, banh bao, banh xeo, sinh to mangue, banh mi pa-tê, chè et autres hu tieu !
Nous passons quasiment une semaine à HCMV, séjour agrémenté par les visites d'amies de Capucine, d'un ancien professeur et surtout par le très agréable accueil de Marie et Philippe dans leur spacieux hâvre de paix saigonnais. Merci à eux d'avoir rendu ce séjour si agréable!
Pour changer un peu d'air, direction les hauts plateaux et plus précisément Da Lat, dont la fraîcheur du climat en fait une des destinations privilégiée des saigonnais. La ville, construite à flanc de collines et arborée de grands pins, a gardé quelques traces architecturales de l'époque coloniale, même si "l'architecture" vietnamienne moderne (plus kitch tu meurs !) gagne de plus en plus de terrain, le charmant et le beau prenant un sacré coup au passage... Fort heureusement, quelques jolis endroits subsistent ça et là...
Il est très agréable de parcourir les environs de cette ville. Montagnes, forêts, lacs et grands espaces font autant notre bonheur que celui des nombreuses familles vietnamiennes. Et oui, le Vietnam change vite, le tourisme local se développe lui aussi. Mais ils sont plus malins que nous, ils ont abandonné le vélo eux... Nan parce que les 15-20 kilomètres très valonnés en VTT avec pluie par intermittence... honnêtement je sais pas qui est le c** qui a eu cette idée géniale mais il aurait mieux fait de la garder pour lui et de faire comme tout le monde : louer une moto !
Pour finir, retour à Saigon où le programme qui suit s'annonce chargé avec l'arrivée attendue d'Anaïs et Alex...
Bises
C. & J.
Playlist: Brassens / Brel / Manu Chao / 2000 ans d'histoire.
Lectures: le Canard enchainé du 02 juin 2010 / Le chercheur d'absolu (Théodor Monod)